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Descriptif
Centenaire de Claude Vigée
Programme du colloque en hommage à Claude Vigée
« Dire pour être
Dire pour naître
Claude Vigée, poète et prophète »
Initié et coordonné par Daniella Pinkstein, ce colloque est organisé par l’Institut Elie Wiesel avec le soutien de la Fondation du Judaïsme Français
Claude Vigée est né le 3 janvier 1921 à Bischwiller en Alsace. Héritier du côté de sa famille paternelle des Lévites, il appartient à une famille enracinée en Alsace depuis plusieurs siècles. "Deux fois juif, et doublement alsacien", disait-il souvent ! Le 19 octobre 1940, la tragédie des juifs de bientôt toute l'Europe, l’effare dans sa prime horreur devant cette Une de Paris-Match qu’il découvre avec le titre cinglant "Le statut des juifs". C'était un jour d'automne presque comme un autre, sur le chemin de son université alors qu'il entrait en troisième année de médecine. "Jamais je n'ai oublié, jamais je n'oublierai cet instant-là. Il a achevé de diviser ma vie en deux temps irréconciliables : celui de la confiance, celui du doute et de l'abandon". Il s'engage alors dans la résistance juive puis en 1942 prend le chemin de l’exil vers les États-Unis.
"Apprends d'un seul instant le sens de tout exil :
Dans ton cœur ravagé d'extrême solitude
Il fait poindre l'amour comme au matin du monde "
Il y soutiendra sa thèse sur la poésie. Celui qui avait voulu être médecin soigne désormais le Temps et les Hommes par l'esprit qui habite le langage. Professeur à ses débuts de Littérature française et comparée à l’Université Brandeis, il quitte son poste et l'Amérique, et débarque la veille de Kippour, un jour pas comme les autres, le 30 septembre 1960, au port de Haïfa. Sur cette terre fertile de "futurs inépuisables ", il enseignera à l'Université Hébraïque de Jérusalem, au département de Littérature comparée que Léa Goldberg avait initié. D'une inspiration prodigue, il écrira un livre par an, de poésies, d'essais, de récits autobiographiques, dont ses célèbres judans... Il ne cessa parallèlement de développer ses connaissances du judaïsme et de ses textes. Admirateur de Manitou, Léon Askénazi, il suivit son enseignement – enseignement qui donna naissance à des essais à caractère exégétiques, – véritables œuvres prophétiques.
Mais, il fut également un proche de Gershom Sholem, avec qui, au fil des conversations, il put approfondir son intérêt pour la kabbale, il fut aussi l'ami, parmi d'autres, de Martin Buber, d'André Néher, d'André Chouraqui, d'Henri Atlan, de Stéphane Moses, de ce monde-là, qui constitue aujourd'hui notre indispensable monde d'ici.
Claude Vigée est l'un des plus grands poètes français, l'un des derniers grands poètes européens, de cette Europe de jadis, et certainement l'un des poètes juifs les plus inédits. Ses œuvres, pléthoriques, plus d'une cinquantaine d'ouvrages, couvrent un spectre de pensée incommensurable. Ses poèmes expriment une « fidélité inconditionnelle à la vie du monde » en dépit du tragique de la condition humaine. Dans ses essais, s’il analyse et critique le dualisme de la pensée occidentale, source d’un nihilisme qu’il combat, il insiste avec autant d’énergie sur le « lien de polarité, de complémentarité spirituelles » qui unit Paris et Jérusalem. « Les destins spirituels distincts de la France et d’Israël se marient comme les voix libres et entrecroisées d’une fugue », écrit-il.
Trop vite classé parmi les poètes "juifs" ou "alsaciens", il ne fut jamais vraiment considéré à la hauteur de son immense contribution au monde à la fois de la poésie, du langage, de la pensée occidentale, de l'essence du judaïsme, et last but not least, à une réflexion incomparable sur l'humanité de demain.
Claude Vigée parle sept langues, il fut non seulement influencé par les plus importants poètes européens, mais il en fut pour certains le traducteur, Rainer Maria Rilke, Yvan Goll, T.S Eliot, Shirley Kaufman, David Rokéah.
S'il faut rendre hommage à tous ceux, poètes, chercheurs, penseurs, écrivains qui ont soutenu son œuvre depuis le Colloque de Cerisy en 1988, l'urgence de sa parole demeure cependant chaque jour plus pressante face à ce monde qui, comme il le craignait, se disloque. Car sa voix, sa force, son interprétation tombent à point nommé dans cette lutte, contre l'Ange ou l'homme, pour trouver encore l'énergie de l'avenir.
A l'admiration et à la reconnaissance qui lui sont dus viendra s'ajouter, à ce Colloque, ce Merci, oui cher poète que vous êtes, cher Claude Vigée, ce merci au-delà de tout, dans l'attente du jour promis, peut-être....