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Les rêveries, les constructions déraisonnables, les « impossibles possibles », les projections fantasmagoriques de l’enfance alimentent un imaginaire qui permet à nos enfants de mettre à distance le réel, de le sublimer. Des expériences cultivées au bon plaisir des découvertes, des jeux, des histoires extraordinaires… Qui ne se souvient pas de ces fragrances de l’enfance ?
À chaque intimité, ses madeleines de Proust, celles qui vous émeuvent à l’âge adulte au gré des réminiscences.
Seulement, les brisures de l’enfance retentissent avec la même force.
Les inconstances, les violences, les absences ou les envahissements viennent faire effraction dans notre présent d’adulte. Ces chaos intérieurs resurgissent alors au détour d’un objet qui fait sens, reprennent feu dans l’émotion d’une séparation, se déclenchent dans un bruit ou une odeur marqués à jamais du souvenir qui fait chavirer. Et c’est alors que la souffrance ancienne, logée quelque part en nous, s’agite encore avec une force renouvelée. On « trimballe » note enfance jusqu’à notre dernier souffle de vie. Elle vibre en nous pour le meilleur et pour le pire, que nous cherchions toute notre existence à la cultiver, l’apprivoiser ou l’étouffer.
Dans nos établissements, Il y a ces regards d’enfants qui semblent avoir vécu mille vies. Des regards voilés par des insouciances éteintes. Ces enfants nous arrivent au détour d’une séparation, d’une rupture vécue comme violente et/ou apaisante à la fois.
A l’aune d’un parcours de vie, ces quelques semaines ou mois dans nos foyers d’urgence ne pourraient être qu’une virgule, mais les témoignages des anciens enfants placés nous montrent à quel point le souvenir des premiers mots, des premières attentions marqueront leur mémoire à tous de manière indélébile.
Nous pouvons raisonnablement poser pour hypothèse que le temps psychique de l’enfant n’est pas celui de l’adulte. Dès lors, une question fondamentale s’impose : nos interventions sont-elles suffisamment ajustées aux processus émotionnels en œuvre chez l’enfant ?
Dans son rapport de novembre 2020 la cour des comptes souligne : « La prise de décision en matière de protection de l’enfance se caractérise par un empilement de délais qui se cumulent, retardant d’autant le moment de la prise en charge : délai de traitement des informations préoccupantes, délais internes aux juridictions, délais d’exécution des décisions de justice, délai pour trouver une orientation durable suite à un accueil d’urgence, etc qui peuvent nuire gravement à l’enfant ».
Nous, protagonistes de la vie institutionnelle de nos établissements, faisons souvent l’expérience du temps qui passe trop vite, bousculé par ce qui fait « Urgence », les rapports à terminer, les projets à boucler, les rencontres à honorer… Il serait bien présomptueux d’imaginer que cette tension n’agit d’aucune sorte sur les enfants accueillis.
L’expérience du confinement dans nos institutions a agi comme un révélateur de l’omniscience de ce questionnement. Un temps institutionnel qui se fige au détour d’une pandémie et l’accueil de l’enfant est réduit à sa plus simple expression, celle de l'expérience de la quotidienneté. Un « vivre avec » en unité de vie, vidé du temps scolaire, des rencontres avec les partenaires, avec la justice…
Un temps qui s’étire pour des enfants qui nous apparaissent parfois « en attente » et un temps qui se contracte, qui se précipite à la lisière de la majorité pour d’autres. Des injonctions à vieillir en accéléré, à abandonner les attributs de l’enfance sont ainsi plébiscités sous couvert d’autonomie.
« Il y a deux sortes de temps : le temps qui attend et le temps qui espère » citait Jacques Brel. Lors de ces deux jours, nous vous proposerons un temps pour penser le parcours de l’enfant au regard de ses ressources et de ses besoins psychiques, de son rythme et de ses perceptions.
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ASSISES NATIONALES DES ETABLISSEMENTS PUBLICS DE LA PROTECTION DE L'ENFANCE
59777 LILLE
FRANCE
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GEPSo
Laura GOMES
Téléphone : 0144688833